Ton Orgueil, Mon Orgueil
Serge est mort. Je dois cinq cents euros au vétérinaire. Comme je n’ai pas assez, le voisin me file une partie. Il a peur que sa carte ne passe pas, au pire il a du cash, moi aussi. A nous deux ça fait le compte.
Il est là parce que je lui ai demandé. Je ne voulais pas être seule, pas attendre demain matin. Serge fonçait dans les murs, il se cachait..
Colette a vu, elle a compris.
C’est la nuit, il est tard mais on dirait plus.
Colette, une siamoise orientale, elle fait plus jeune que son âge, c’est moi qui joue son rôle : T’en fais toujours des tonnes..
Serge, joué par le voisin, même genre que Colette en plus sombre, il est vieux mais pas assez pour mourir : Tu peux parler !
Colette : Moi je fais les bruits de la vie.
Serge : Tu veux dire tes chaleurs ?
Colette : Je croyais que t’aimais. De toute façon, j’en ai plus.
Serge : Dommage..
Colette, elle rit : Tu m’as bien mis sur la gueule.
Serge : J’étais malade, t’as entendu le toubib.
Colette : Nan, au début, quand je suis arrivée.
Serge : J’ai voulu te défoncer dès que je t’ai vu.
Colette, après un silence : Tu te souviens quand on se vouvoyait ?
Serge : Pleure pas vas, tu vas t’en trouver un autre.
Colette : Je m’en fiche, je ne partage plus ma litière.
Serge : Genre.. Y a un petit jeune au deuxième, un blond, il se balade dans les couloirs.
Colette : Quelle race ?
Serge : Sibérien.
Colette : C’est pas juif.
Serge : Nan mais ça coûte un bras.
Colette : A voir..
Serge, il s’allume une cigarette : T’en veux une ?
Colette : Pourquoi pas, ça fait un bail.
Serge : Qu’est-ce que tu m’as saoulé avec ça.
Colette : J’aime pas l’odeur.
Serge : Et là ?
Colette : Ça sent toi. Je te rends tes clefs.
Serge : Ça te gêne ?
Colette : Tu ne me laisses pas vraiment le choix.
Serge : Comme tu veux.
Colette : De me dire que je peux rentrer, ça me met mal à l’aise.
Serge : Retiens-toi.
Colette : J’arrive pas.
Serge : Je vois ça.
Colette : Pourquoi tu me le dis ?
Serge : Tu me fous un couteau dans le dos, tu veux que je me la ferme ?
Colette : Je déteste quand tu montes dans les aigus.
Serge : C’est de la pudeur.
Colette : Connais pas.
Serge : T’es tellement ils prononcent le mot en même temps intrusive.
Colette : Je suis triste que tu partes.
Serge : J’aime pas vieillir.
Colette : Qu’est-ce que je vais devenir, je ne connais la vie qu’à travers tes yeux, qu’à travers tes oreilles. J’ai grandi avec toi.
Serge : Tu vas vivre ta vie de chatte.
Colette : Comment je fais si j’aime pas le jeune ?
Serge : Tu verras bien.